Crédit image : Patrick Despoix, licence CC-by-sa 4.0
Contexte de la décision du Conseil d’État
Le projet attaqué se trouve sur la commune d’Urrugne, commune littorale des Pyrénées-Atlantiques, et porte sur un lotissement de 11 lots déposé par l’Office public de l’habitat des Pyrénées-Atlantiques.
Le permis d’aménager a été attaqué, annulé par le Tribunal Administratif et le bénéficiaire de l’autorisation se porte en pourvoi.
Le projet en lui-même se trouve à plusieurs kilomètre du littoral et n’est pas concerné par la bande d’inconstructibilité des 100m ni de l’extension limitée de l’urbanisation dans les espaces proches du rivage. Elle est concerné par un article dont la rédaction a été modifié par ELAN : celle de ” l’extension de l’urbanisation en continuité” (article L. 121-8 du CU).
Extension de l’urbanisation, les modifications issues de la loi ELAN
Dans son ancienne rédaction, l’article L.128-1 prévoyait que :
“L’extension de l’urbanisation se réalise soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l’environnement.” Il résultait de la jurisprudence que les dents creuses situées en dehors des hameaux et villages, étaient par nature inconstructibles, même à plusieurs km du littoral.
Sa nouvelle rédaction de L.128-1, 2eme alinéa :
“L’extension de l’urbanisation se réalise en continuité avec les agglomérations et villages existants.”
”Dans les secteurs déjà urbanisés autres que les agglomérations et villages” […] “des constructions et installations peuvent être autorisées”[…]“ces secteurs déjà urbanisés se distinguent des espaces d’urbanisation diffuse par, entre autres, la densité de l’urbanisation, sa continuité, sa structuration par des voies de circulation et des réseaux d’accès aux services publics de distribution d’eau potable, d’électricité, d’assainissement et de collecte de déchets, ou la présence d’équipements ou de lieux collectifs”. L’autorisation est soumise pour avis à la commission départementale de la nature, des paysages et des sites
Extrait des conclusions du rapporteur public, résumant ces caractéristiques :
“Il en résulte désormais que, dans les communes littorales, l’extension de l’urbanisation selon le principe de continuité doit s’apprécier en identifiant et en distinguant les agglomérations et villages existants, les secteurs déjà urbanisés et les espaces d’urbanisation diffuse. Elle est possible dans le premier cas ; elle l’est aussi, sous conditions, dans le second ; elle ne l’est pas dans le troisième.”
Les conditions évoquées par le rapporteur pour l’extension de l’urbanisation dans les secteurs déjà urbanisés sont :
“dans les secteurs déjà urbanisés identifiés par le SCOT et délimités par le PLU” […] “de densifier l’urbanisation à seule fin de permettre l’amélioration de l’offre de logement ou d’hébergement et l’implantation de services publics, à l’exclusion de toute extension du périmètre bâti et sous réserve que ce dernier ne soit pas significativement modifié”
Des dispositions transitoires, le temps de prise en compte dans les documents d’urbanisme
Cette mesure transitoire prévue dans la loi ELAN (Art. 42, III) autorise par anticipation, entre la date d’approbation de la loi et le 31 décembre 2021, “les constructions dans les secteurs déjà urbanisés non encore identifiés par le SCoT ou non délimités par le PLU”.
Le TA avait jugé que le terrain d’assiette du projet se situait dans un “compartiment ne présentant pas une densité significative de constructions et ne relève dès lors pas d’un secteur urbanisé”. En raisonnant par recherche de densité significative, comme on le ferait pour les secteurs déjà urbanisés, le TA n’a pas pris en compte l’application de la nouvelle rédaction de l’article L.128-1. Les dates du projet en questions permettaient en effet l’application de la mesure transitoire.
Or, en application de cette mesure transitoire, le CE estime que le terrain se trouve bien dans un secteur “déjà urbanisé”, répondant aux caractéristiques vues plus haut. Le projet est donc compatible avec la loi littoral, et la décision renvoyé au TA.
Ce que vient préciser cette décision
Le jugement du TA est annulé dans le sens qu’il recherchait uniquement la densité pour qualifier le secteur, sans prendre en compte les critères spécifiques des secteurs déjà urbanisés. Le rapporteur souligne qu’il s’agit “d’un niveau intermédiaire d’urbanisation, entre ce qui est significativement urbanisé et ce qui est une urbanisation diffuse”
Pour aller plus loin
Décision du Conseil d’État, 22 avril 2022 et les conclusions du rapporteur public
Fiche technique ministérielle – Littoral et Urbanisme – “Les règles d’urbanisation dans les agglomérations, villages et secteurs déjà urbanisés” – juin 2021

